Ma dernière lecture en date – La Particule – ne m’avait pas du tout convaincu, et c’est donc avec une certaine appréhension que je me suis lancé dans Instinct de Survie de Pierre Picca, là aussi édité aux éditions Baudelaire. Tout comme La Particule, il s’agit donc d’un roman de zombies écrit par un auteur français, sorti quant à lui en novembre 2015. Grosse différence cependant, Pierre Picca embrasse ses origines et c’est du côté de Reims (comme Simon J. Paul l’avait fait avec Deads’ Diary) qu’il nous embarque pour son histoire.
“Oubliez ce que vous pensiez être impossible, ouvrez grand vos yeux et vos oreilles, ne croyez plus en rien, soyez désormais sur vos gardes. Le monde tel que vous le connaissiez n’existe plus, il vient de basculer dans un enfer que vous n’auriez jamais pu imaginer. Antoine, militaire de réserve, l’a compris depuis peu. Plus rien ne sera comme avant. Il va être pris dans une tourmente infernale de violence embrasant le pays et balayant tout sur son passage, ne laissant que peu de survivants, des villes en ruines… et des êtres plus tout à fait humains. Antoine va devoir lutter pour survivre, seul contre tous.”
Comme bon nombre de romans américains qui ont fait le succès du genre zombie, Instinct de Survie est à classer parmi les survivals militaristes, l’histoire étant tout simplement celle d’Antoine, un militaire de réserve, alors qu’il tente de survivre à l’épidémie zombie qui frappe le monde. Cependant, à la différence de certains ouvrages américains, ici, pas d’histoire de super héros sauvant le monde, simplement le récit d’une survie assez banale, rythmée d’abord par les tentatives d’Antoine et de l’armée de sauver les survivants de Reims, avant ensuite de se centrer uniquement sur la survie d’Antoine dans sa quête pour retrouver sa bien aimée.
Ces deux parties sont d’ailleurs bien distinctes en terme d’histoire. La première, vraiment classique et gâchée par un début assez poussif (j’ai failli abandonner la lecture quand le héros soutient que le sang d’un des premiers zombies qu’il rencontre est du ketchup, tant cette scène est pitoyable), nous livre un récit lambda dans le genre. J’ai cependant apprécié de voir que Pierre Picca ne s’est pas contenté de faire de ses militaires de simples chèvres et qu’il les pousse rapidement à déserter pour mener des missions bien plus en accord avec la réalité du terrain. Sans être passionnante, cette partie de l’histoire tient simplement la route.
La seconde, bien que le héros s’y montre assez régulièrement agaçant avec son comportement de fanfaron peu réaliste, m’a en revanche plus intéressé. L’introduction des Amazones, un groupe de femmes survivant seules, m’a semblé une bonne idée que l’auteur exploite plutôt habilement, passées les premières pages vraiment très (trop) caricaturales. Nous retombons rapidement dans un récit de survie très classique mais les plans mis en place, entre quelques batailles vraiment très redondantes contre les zombies, sont plutôt bien sentis même si je reproche à l’auteur son manque de cohérence en ce qui concerne la résistance des zombies, ceux-ci mourant d’une simple flèche dans le buste mais survivant des jours entiers atrocement mutilés…
En fait, pour un survival, Instinct de Survie manque surtout d’un vrai fil conducteur autre que la simple survie pour vraiment intéresser le lecteur, les personnages et leurs histoires d’amour étant assez simplistes.
Enfin, concernant le style, qui reste un critère très important pour juger un premier roman, Instinct de Survie transpire du “syndrome premier roman” avec parfois une écriture forcée, cherchant inutilement à faire dans le poétique et l’imagé. La lecture n’en est pas pour autant terriblement impactée mais il m’a parfois été difficile de suivre, l’auteur se perdant trop souvent en précisions sans intérêt.
Quelques exemples :
“J’enfilai mes bottes de sécurité, et Lola devina qu’il y aurait du béton aujourd’hui, en plus de cette boue qui était sans cesse retournée avec les roues des engins et des semi-remorques sillonnant et ravitaillant la plaie béante et bruyante dans la terre que formait cette grande entreprise de l’homme, témoin de la domination qu’il exerçait sur son environnement et de sa maîtrise des éléments, preuve de son génie et reflet de son mode de vie tachés de ses excès.”
“Les immeubles restaient figés comme dans une vieille photographie en noir et blanc, figés dans le temps et n’abritant plus la vie qu’ils logeaient en eux jadis, les façades étaient décrépites aux fenêtres parfois éclatées ou brisées, les rideaux volant au vent, et malgré la lumière de cet après-midi de printemps qui rendait toute sa vie, sa majesté et sa beauté, malgré cette lumière, les antres de ces blocs de béton paraissaient sombre et lugubres, renfermant des choses qui ne devaient être vues et approchés, des créatures de la nuit venues des ténèbres pour envahir le royaume des hommes agonisants.”
Tout comme La Particule, le roman est également ponctué de très nombreuses erreurs, fautes, répétitions (bien plus que la moyenne), ce qui me pousse en fait à remettre en question la qualité du service éditorial des éditions Baudelaire… en plus d’une classification, tenez-vous, en fantasy de l’ouvrage.
“Un petit réchaud brûlait sous une petite casserole d’eau chaude et la chaleur du petit foyer et des corps, côte à côte, nous firent du bien. Une petite collation…”
En fin de compte, Instinct de Survie est un effort louable et d’autant plus français mais qui n’apporte rien au genre et qui crée bien moins d’excitation chez ses lecteurs que ses cousins américains, la localisation en France n’apportant finalement pas grand chose au roman… À lire si vous avez fait le tour du genre…