Épisode 16 – Le visage du tueur
Valery se releva difficilement. Elle avait mal au dos mais elle était libre. Les conseils du type au bob avaient porté leurs fruits, la corde usagée avait cédé sous son poids. Elle défit les liens qui maintenaient ses pieds attachés, face aux zombies qui grognaient, bien incapables de l’attraper. Elle se posta ensuite devant la porte. Elle s’apprêtait à l’ouvrir quand son regard terrifié plongea à travers le hublot. Le tueur au masque de clown arrivait.
Prise de panique, elle parcourut malhabilement la pièce de ses yeux exorbités à la recherche d’une quelconque arme pour se défendre. Mais il n’y avait rien. La pièce était vide.
Le tueur se rapprochait dangereusement, son couteau de boucher ensanglanté à la main. Valery eut alors une idée. Si elle ne pouvait pas se défendre, elle pouvait faire diversion. Les morts-vivants étaient son seul espoir. Ils lui avaient tout prix : son mari, ses amis, sa vie, mais à présent, elle avait besoin d’eux. C’était un juste retour des choses. Après deux années passées à abattre leur colère sur ce monde, le moment était venu de mettre leur talent de destruction à son service.
Elle se présenta derrière le macchabée pendu à côté d’elle. Elle l’agrippa par la chemise et le poussa aussi fort qu’elle le pouvait avec l’espoir que la corde cède aussi sous son poids. Mais elle résista. Le mort se balançait d’avant en arrière en grognant et en agitant ses bras désarticulés. Elle se saisit de lui à nouveau et le poussa plus fort. La corde céda enfin mais la créature se fracassa le crâne en retombant. Un amas de cervelle tapissa le sol.
Un coup d’œil rapide par le hublot de la porte: le mastodonte au couteau était à quelques mètres seulement. Valery rassembla toutes ses forces et parvint à libérer trois zombies en usant du même stratagème. Elle libéra les liens au niveau de leurs pieds pourrissant et ils se redressèrent maladroitement.
Le tueur poussa la porte et entra. Son regard se posa aussitôt sur Valery, debout, devant lui. La femme pouvait voir ses yeux à travers les trous de son masque. Ils étaient grands ouverts. Ils exprimaient une immense colère. La savoir libérée ne l’enchantait guère. Il fit un pas vers elle, brandissant son couteau, quand les zombies délivrés se jetèrent sur lui comme s’ils avaient compris qui était la cible. Surpris, l’homme manqua basculer en arrière mais parvint à arracher le visage de l’un d’eux d’un coup de couteau. Il agrippa le cou d’un autre d’une main ferme. Un combat s’engagea alors entre lui et les morts-vivants.
Valery profita de cette diversion pour s’échapper alors que le tueur tentait de se défaire des griffes de ses agresseurs. Elle traversa la salle où se trouvait l’imposant rouleau compresseur. Les restes du type au bob gisaient derrière, amoncelés sur le sol. Elle franchit une porte et se retrouva dans la salle d’éviscération.
La pièce était étroite. Elle ressemblait à un couloir terne. Un tapis roulant longeait les murs, en forme de u. Il servait à couper les carcasses des animaux. Valery ne s’y attarda pas. Elle courait vers le fond du corridor sans un regard derrière elle, la peur au ventre. En un instant, elle se retrouva dans un immense hangar. C’était la zone de chargement.
Des dizaines de palettes s’entassaient sur le sol. Des sacs de viandes y étaient entreposés. La viande avait pourri et diffusait une odeur âcre. Le sol était humide et froid. Les murs en tôle s’élevaient sur plusieurs mètres de hauteur.
Valery traversa la pièce à la hâte et souleva l’un des portails du quai de chargement à la seule force de ses bras. Puis elle sortit et s’immobilisa tout à coup.
Un long couloir entouré de grillage s’élançait devant elle, serpentant comme un labyrinthe sans fin dans une immense clairière. Il débouchait sur un grand enclos où gisait des carcasses d’animaux morts. Valery avait deux solutions : s’aventurer dans le couloir grillagé ou faire demi-tour. Le choix était clair. Hors de question de rebrousser chemin.
Elle bondit du quai sur l’herbe fraîche de la clairière et s’engouffra dans le long corridor. Elle s’éloigna de l’abattoir à petite foulée, persuadée d’être enfin tirée d’affaire. Le soleil brillait au-dessus du bâtiment. Elle ne savait combien de temps elle était restée à l’intérieur mais la position du soleil lui indiquait que c’était la fin d’après-midi.
Elle était arrivée à mi-chemin quand elle remarqua une porte au fond de l’enclos. Elle hâta alors le pas mais le tueur, sorti de l’abattoir par une autre issue, apparut de l’autre côté du grillage. Il tenait la tête d’un macchabée d’une main et le couteau de l’autre. Le cœur de Valery trembla. Elle détourna son attention du type et courut vers la porte qui n’était plus qu’à quelques dizaines de mètres. Le tueur balança la tête du zombie et se mit avancer à grandes enjambées vers elle.
Le monstre parvint à sa hauteur et coupa sa course en passant le couteau entre les maillons du grillage. Surprise, Valery tomba au sol. Elle recula aussitôt alors que le tueur agitait son arme pour l’atteindre. Il donnait de grands coups à quelques centimètres de son visage. La lame fendait l’air en émettant de petits clappements.
Alors qu’elle pensait être prise au piège, terrifiée face à la détermination du tueur, une Dodge Nitro apparut derrière l’homme. Le moteur ronflant et les turbines poussées à leur maximum, elle comprit qu’il ne s’arrêterait pas. Elle prit alors appui sur ses jambes et plongea sur le côté. Le véhicule percuta violemment le mastodonte en emportant dans son sillage le grillage, coupant ainsi le corridor en deux et libérant Valery du piège dans lequel elle était tombée.
Le véhicule s’arrêta un peu plus loin dans un nuage de fumée, le pare-chocs enfoncé sous la violence de l’impact. Une portion du grillage était restée accrochée à la carrosserie, d’autres morceaux s’amoncelaient sur le sol. Caïn, accompagné de trois de ses sbires, sortit de la Dodge, son fusil braqué devant lui. Valery lâcha un soupir de soulagement. Elle se releva, la respiration haletante, et rejoignit le groupe.
— T’es venu me chercher ! s’étonna-t-elle, émue.
— J’allais pas te laisser croupir ici, répondit Caïn. (Il parcourut la zone d’un regard inquiet). Et mon pisteur ?
Valery ne répondit pas. Elle se contenta de baisser les yeux avec tristesse. Caïn avait compris. Il retrouva ses hommes qui s’étaient massés autour du corps du tueur. Brisés à plusieurs endroits, ses jambes et ses bras avaient pris une posture improbable, comme un pantin que l’on aurait jeté nonchalamment au sol. Son buste était enfoncé dans sa poitrine.
— Il est mort, Caïn ! lança un des hommes.
— Ouais, ce salopard a eu son compte ! dit un autre.
Curieux de découvrir l’identité du tueur, Caïn avança lentement sa main vers le masque et le retira. Le visage de l’homme était difforme. Son crâne rasé était bosselé.
— C’est un putain de débile mental ! s’exclama avec dégoût un des sbires.
Tout à coup, le tueur ouvrit les yeux et tendit une main vers Caïn dans un dernier sursaut. L’homme pointa aussitôt son fusil vers lui et laissa échapper sa colère en déversant une rafale de balles sur son visage.
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