The Last Survivors, Saison 2 – Épisodes 3 & 4

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Épisode 3 – Mécanisme de défense

Le bunker n’était pas le dernier endroit à la mode. Aucun décorateur ne s’était précipité pour un lifting complet. Les lieux étaient inhospitaliers avec leurs murs ternes et leur plafond malodorant. Cependant, c’était certainement l’endroit le plus sûr à des kilomètres à la ronde. L’entrée des galeries menant au barrage ayant été condamnée par ses occupants suite à la dernière attaque, cette vieille construction datant des années 80 était le Saint Graal pour tout survivant. C’était là où il fallait être en pleine apocalypse zombie.

Sarah s’y sentait bien. Rien ne s’était produit depuis son arrivée, il y a une semaine. Pas de zombies cherchant à se repaître des vivants ni de survivants se croyant au-dessus des lois, prêts à imposer leur autorité. Juste le calme et la tranquillité d’une vie devenue presque banale. Le bunker était un havre de paix. Les gens vivaient sans vraiment se soucier de ce qui se passait à l’extérieur, vaquant à leurs occupations quotidiennes partagées entre les discussions et les repas pris dans la salle commune. Le bunker semblait perdu entre deux mondes. C’était une sorte de purgatoire, bloqué entre le monde des vivants et celui de morts.

Sarah était assise sur le rebord du lit, dans la chambre qui lui avait été donnée lors de son arrivée. Elle berçait le bébé de Stacy en fredonnant une comptine. Le nourrisson s’était endormi dans ses bras rassurants, la bouche ouverte. Il semblait apaisé. Stacy entra brusquement, le visage assombri par un mécontentement à peine dissimulé. Elle prit sa fille, l’arrachant presque des bras de Sarah et dit sur un ton revanchard :

—    Qu’est-ce que je t’ai dit ?

—    C’est Isa qui me l’a confié, répondit Sarah d’un air étonné.

—    Eh bien Isa devrait apprendre à être plus responsable !

Sarah ne comprenait pas l’attitude de Stacy depuis son arrivée. L’adolescente était distante avec elle, presque nonchalante.

—   Pourquoi tu agis comme ça ? demanda Sarah, fronçant les sourcils par agacement.

—   Agis comme quoi ?

—   Depuis mon arrivée, tu m’as à peine adressé la parole.

—   Et tu ne te doutes pas pourquoi ! s’exclama l’adolescente avec froideur.

Sarah répondit d’un hochement de la tête.

—   T’es contagieuse ! poursuivit Stacy en haussant la voix. Imagine que tu contamines mon bébé ! C’est la seule famille qu’il me reste sur cette Terre !

—   Mais…

—   Tu ne t’approches plus d’elle, compris !

Sur ces paroles, elle tourna les talons et sortit de la pièce. Sarah resta bouche-bée. Que pouvait-elle répondre à cela ? Stacy avait raison. Elle était contagieuse. La moindre goutte de sang, salive ou sécrétion contaminerait sans nul doute le nourrisson. Même si elle prenait toutes les précautions possibles, il y avait toujours un risque d’accident alors elle acquiesça sans broncher et baissa la tête avec tristesse.

***

Après avoir confié son enfant à une personne responsable, une personne qui ne la confierait pas à son tour à Sarah, Stacy entra dans le vestiaire, furibonde. Elle ouvrit une des armoires métalliques d’un geste vif et se saisit de son arme. Le vieil homme à la canne entra mais resta sur le pas de la porte.

—    J’ai entendu ta conversation avec Sarah.

—    Quoi ! lança Stacy en rechargeant son arme. Tu vas t’y mettre toi aussi !

—   Je sais que tu ne penses pas réellement ce que tu lui as dit. Sarah est une femme responsable. Elle prend toujours toutes les précautions nécessaires avant de prendre ta fille dans ses bras. Alors qu’est-ce qu’il y a ?

L’adolescente referma la porte de l’armoire et posa le front contre le casier en soufflant, désespérée.

—    C’est de sa faute si elle a disparu !

—    Qui ? Taylor ? s’enquit le vieil homme.

—    Elle n’aurait jamais dû se rendre au Sanctuaire !

Le vieil homme venait de comprendre. Stacy agissait comme une adolescente qui avait perdu sa grande sœur. Elle cherchait à rejeter la faute sur Sarah.

—   Sarah n’y est pour rien. Tu le sais très bien. Si Taylor est dans cette situation, c’est entièrement de sa faute.

—   Arrête.

—   Ne sois pas injuste avec elle et avec toi-même. Laisse-lui une chance et tu verras que Sarah est une personne honnête.

Stacy décolla son front du casier en pestant. Elle mit son arme dans son sac à dos et sortit de la pièce.

—    Où tu vas ? demanda le vieil homme, inquiet.

—   Chercher du lait pour ma fille ! héla Stacy depuis le couloir. Si je ne prends pas soin d’elle, qui le fera ?

Au fond d’elle, même si elle n’osait pas se l’avouer, elle savait que le vieil homme avait raison. Elle en voulait à Taylor de l’avoir abandonnée et laissée seule avec sa fille, au bunker. Sarah n’était qu’un bouc-émissaire, un punching-ball sur lequel elle devait se défouler.

Elle sortit du bunker, son sac-à-dos à l’épaule, en prenant soin de refermer la lourde porte derrière elle, et rejoignit le 4×4 qu’ils avaient pris lors de leur fuite du Sanctuaire. Elle regrettait tout de même sa Volvo rouge. Même si ce n’était pas le parfait véhicule lors d’une course-poursuite, elle y était attachée. Elle lui rappelait sa vie d’avant.

Elle monta dans le 4×4 et se retourna brièvement pour poser son sac sur la banquette arrière. Elle se redressa ensuite face au volant et sursauta quand Sarah entra à son tour et s’installa sur le siège passager.

—    Putain ! lâcha l’adolescente. Tu m’as fichu une de ces trouilles !

—    Désolé.

—    Qu’est-ce que tu fiches ici ?

—    Il m’a tout dit.

Stacy souffla.

—    Ce vieux croulant devrait apprendre à se mêler de ses affaires !

—    Ne lui en veux pas. Il s’inquiète pour toi.

—    Ouais. C’est ça.

L’adolescente observait d’un air intrigué Sarah mettre sa ceinture de sécurité.

—    Et tu crois faire quoi, là ? s’enquit-elle avec étonnement.

—    Je viens avec toi. Ça nous laissera le temps de faire connaissance.

—    Et merde ! Il ne manquait plus que ça !

Résignée, elle démarra et le véhicule quitta le petit chemin de terre qui menait au bunker.

The last survivors

Épisode 4 – Un air de déjà-vu

Des vers avaient entièrement recouvert le corps du zombie encastré dans le pare-brise du Hummer militaire et pullulaient sur le tableau de bord. Trois macchabées s’étaient rassemblés autour du véhicule, ahuris face à la posture improbable de leur congénère. Deux hommes munis de fusils M-16 apparurent tout à coup derrière eux, sortant du bois. Les créatures se retournèrent quand elles entendirent le bruissement des feuilles s’écrasant sous les lourdes bottes des soldats et grognèrent, le ventre creux. Elles tendirent leurs bras dans la direction des deux hommes mais ceux-ci les abattirent sans sommation.

Un pick-up noir et une Dodge Nitro rouge débouchèrent du virage, leurs moteurs vrombissant, et s’arrêtèrent sur le bord de la chaussée. Caïn s’extirpa du pick-up et rejoignit les deux hommes en contrebas, en empruntant le talus qui descendait jusqu’au véhicule accidenté.

—    L’enfoiré ! lança-t-il avec véhémence. Ce salopard à niqué mon Hummer !

Un des deux hommes, un type d’une soixantaine d’années, un bob enfoncé sur le crâne, l’interpella.

—    Caïn ! Les traces démarrent là.

Caïn ravala sa colère et fit le tour du véhicule encastré dans l’arbre. Il découvrit, à une dizaine de mètres du Hummer, un zombie dont le visage avait été défoncé par une pierre et un autre, un peu plus loin, adossé à un arbre avec une branche lui transperçant le front.

—   Cet idiot, dit l’homme sur un ton sarcastique, en plus d’avoir planté ma bagnole, est tombé sur un groupe de macchabées pas tout frais !

—   Les traces de pas vont dans cette direction. Deux différentes.

—   Ouais. Henry et cette femme.

Valery les rejoignit en fixant les corps inertes des zombies d’un air terrifié. Elle porta ensuite son attention sur Caïn et lâcha :

—   Il se débrouille plutôt bien jusqu’à présent. Butter ces morts-vivants après s’être planté contre l’arbre. Chapeau !

—   Il a simplement eu de la chance, répondit l’homme, piqué au vif.

—   De la chance ? Si tu le dis. C’est pas lui qui t’a pris par surprise à la ferme et t’a obligé à rester cacher jusqu’au lendemain ?

Agacé par ces propos, Caïn se tourna vers ses hommes qui s’étaient regroupés sur le talus et s’exclama :

—   Bon. On laisse les bagnoles ici pour l’instant et on continue à pied ! Soyez sur vos gardes. Henry peut être n’importe où !

Il se dirigea ensuite vers les véhicules pour prendre son barda et maugréa en croisant Valery :

—    Putain de jap !

—    Je suis chinoise, rétorqua la femme entre ses dents.

***

Le groupe progressait dans la forêt en file indienne. Ils empruntaient des sentiers escarpés et traversaient des passages abondants, slalomant entre les arbres avec difficulté. En tête de peloton, le type au bob enfoncé sur le crâne suivait la piste de Sarah et Henry. Il portait un gilet de chasse beige et une paire de jeans bleu délavé un peu trop large qui lui donnait une apparence ridicule.

Caïn, qui fermait la marche, brusqua le pas et parvint à la hauteur de Valery qui marchait devant lui. Elle ne semblait pas très à son aise dans cet environnement. Elle glissait parfois sur une pierre ou s’emmêlait les pieds dans les racines des arbres mais elle restait digne. Elle ne voulait surtout pas montrer son agacement à crapahuter dans la forêt de peur que le groupe ne l’oblige à retourner aux véhicules.

—    Désolé pour tout à l’heure, dit Caïn avec humilité. Je me suis un peu emporté.

Valery ne répondit pas. Elle se contenta d’ignorer ses propos, concentrée sur chacun de ses pas pour ne pas tomber.

—   T’es avec nous depuis quoi… poursuivit l’homme, quatre mois maintenant et je ne te connais pas vraiment.

—   Je parle peu.

—   Savoir se faire discrète est une qualité que j’apprécie chez une femme.

Un rictus se dessina sur le visage de l’infirmière.

—    Alors dis-moi, ajouta Caïn. C’est quoi ton histoire ?

—    Celle de tout le monde. Peuplée de zombies, de morts et de survie.

—   T’es mariée ? s’enquit l’homme en remarquant la bague coincée sur son annulaire.

—   Je l’étais, oui.

—   On a tous perdu des êtres chers. Moi, j’ai perdu ma femme et mon fils lors des premiers jours alors je sais ce que c’est. Cette douleur qui te prend aux tripes et qui revient au moment où tu t’y attends le moins.

Caïn venait de décrire exactement le sentiment qui gangrenait l’esprit de la jeune chinoise depuis presque deux ans. Elle ne souriait pratiquement jamais, ne s’abandonnait à aucun loisir et ne s’accordait pas plus de repos que nécessaire. Son occupation au camp, au-delà de la satisfaction de soigner les maux des survivants, l’aidait à oublier son parcours mais, comme l’avait si justement dit Caïn à l’instant, elle replongeait toujours dans une profonde tristesse, quoi qu’elle fasse.

Sa tête pivota vers l’homme qui attendait une réponse de sa part.

—    T’avais une famille ! s’exclama-t-elle avec étonnement.

—    Ouais. Étonnant, non ?

Le type qui les guidait s’immobilisa tout à coup puis se baissa en posant un genou au sol. Surpris par sa posture, Caïn coupa court à la conversation et le rejoignit d’un pas décidé. L’homme réfléchissait.

—    Y a un problème ?

—    Les traces s’arrêtent ici.

—   T’en es sûr ? demanda Caïn qui ne voulait pas voir ses chances de retrouver Henry s’envoler.

—   Il y a deux sortes de pas qui se rejoignent à cet endroit. Ceux qui partaient du Hummer et ceux d’un autre gars. Ils sont restés un moment ici à en croire la profondeur des pas dans la boue.

L’homme se redressa comme possédé, contourna un épais bosquet et déboucha sur un sentier plus large que celui qu’ils avaient emprunté. Caïn le suivit sans un mot, curieux.

—   Un véhicule s’est arrêté là. Les traces de pneus indiquent qu’il est arrivé par-là, a fait demi-tour et est reparti dans la même direction.

—   Henry ?

—   Aucune idée. Il y a sept ou huit traces de pas différentes.

—   Il a peut-être rencontré de la résistance ?

—   Je ne pense pas. Il n’y a pas de trace de lutte ni de douilles sur le sol. (Il marqua une pause et reprit.) Tu veux mon avis ?

Caïn opina de la tête. Le type poursuivit.

—   T’as deux possibilités. Les pas, derrière le bosquet, repartent vers ce groupe d’habitations, là-bas. Celles des pneus vont dans la direction opposée. Tu dois faire un choix.

Caïn se retourna et aperçut les toits des maisons qui s’élançaient au-dessus des arbres. Il fit demi-tour et observa un instant le sentier qui disparaissait dans la forêt. Il devait faire un choix : se rendre jusqu’aux habitations ou suivre la piste du véhicule.

—   Ok ! s’exclama-t-il à la cantonade. Je veux deux hommes avec moi pour suivre les traces sur le sentier. Les autres, vous vous rendez aux habitations là-bas. Vous me les fouillez de fond en comble ! Je ne veux pas que ce salopard puisse s’échapper. On se regroupe sur la nationale un peu plus loin dans une heure !

Les hommes s’exécutèrent aussitôt et formèrent deux groupes. Caïn s’approcha discrètement de Valery et lui dit :

—    Et toi, tu vas où ?

—    Je reste avec toi, Caïn !

—    Ça m’aurait étonné !

L’homme leva la tête et prit une voix autoritaire.

—    Allez ! On s’active ! Je veux ce salopard avant la tombée de la nuit !


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2 commentaires

  1. Casa2casa dit :

    Attention, attention
    “Sarah n’était qu’un bouc-émissaire, un punching-ball sur lequel elle devait se défouler.”
    Là, Sarah serait plutôt une tête de Turc (http://bouc-émissaire.com/theories/la-tete-de-turc-un-bouc-emissaire/) voire un souffre douleur… mais pas un bouc émissaire (http://bouc-émissaire.com/theories/le-souffre-douleur-un-bouc-emissaire/)

    1. sebastien dit :

      Effectivement Casa2casa. Merci d’avoir relevé cette petite erreur. :)

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