Alors qu’il y a peu nous avons pu poser toutes nos questions à Mark Tufo, l’auteur de la saga Zombie Fallout, nous avons également pu nous tourner vers Darren Shan, l’auteur des romans Zom-B. Également publiée par Panini Books en France, cette série – dont le tome 1 est sorti récemment – promet déjà d’animer régulièrement la culture zombie dans notre pays et c’est donc avec beaucoup de plaisir que nous avons questionné son auteur :
[Attention la suite peut contenir quelques spoilers]
MZC : Pour commencer Darren, peux-tu nous parler de toi ?
Darren Shan : Je suis né à Londres et j’ai toujours un accent Cockney, mais j’ai vécu en Irlande presque toute ma vie. J’ai toujours voulu être écrivain et j’ai commencé à sérieusement faire de ce rêve une réalité durant mon adolescence quand j’ai commencé à écrire des histoires et à m’amuser avec elles quand j’avais du temps libre. J’ai essayé de faire durer ma jeunesse aussi longtemps que possible mais j’ai pas mal grandi depuis mes 40 ans : je me suis marié et ai eu mon premier enfant, Dante. J’adore lire, regarder des films et les séries télé de bonne qualité, et aussi voyager. J’aime aussi les comics et j’ai commencé à collectionner les planches de comics quand mes livres ont commencé à avoir du succès ce qui a fini par étendre mes domaines d’intérêt et je visite depuis régulièrement des musées et des galeries d’art.
Les zombies ne sont pas la première figure populaire à laquelle tu t’es intéressé. Après avoir écrit sur les démons et les vampires, qu’est-ce qui t’a décidé à te lancer dans Zom-B ?
Zom-B est en fait né de mon envie d’écrire un livre qui s’attaque aux problèmes du racisme et de l’abus de pouvoir. Même si je n’avais que peu d’intérêt pour la politique dans ma jeunesse, j’ai commencé à m’intéresser vraiment au monde depuis que j’ai commencé à voyager et à rencontrer d’autres personnes. Nous vivons une période chaotique en ce moment (bien que, pour être honnête : quand ne le sommes-nous pas ?!), et je suis très mal à l’aise face à la montée de l’extrême droite un peu partout en Europe. Nous avons tous vu où ce genre de sentiments nous mène, et je pense que l’idée selon laquelle l’histoire se répète est assez vraie, nous devons donc apprendre de l’histoire et faire en sorte de ne pas répéter nos pires erreurs. Je voulais écrire un livre sur les dangers de haïr gratuitement, sur ce qui se passe quand on laisse nos leaders nous monter les uns contre les autres, sur le fait qu’on risque de devenir des monstres si on s’abaisse au niveau de ceux qui s’en prennent à nous. Mais comme je ne voulais pas le faire de manière moralisatrice, sans intrigue, j’ai cherché une façon originale de le faire, et les zombies m’ont semblé une bonne solution. J’aime l’idée d’écrire un roman où dans un monde envahi par les inconscients, assassins morts-vivants, les pires des monstres restent les vivants qui complotent pour profiter des autres.
Avant d’écrire Zom-B, comment t’es tu préparé ? Étais-tu déjà un fan des zombies ou as-tu dû regarder des films afin de créer ta propre mythologie zombie ? Et il y a-t-il un film ou livre qui t’a vraiment influencé ?
J’ai regardé plein de films de zombies et c’est vraiment ma seule préparation. Je savais que je n’allais pas suivre l’archétype traditionnel du zombie et que j’allais jouer avec les règles et créer ma propre vision du zombie alors je me moquais un peu de savoir s’ils allaient vraiment respecter les canons habituels. En ce qui concerne les œuvres qui m’ont le plus influencé, je dirais Zombie ainsi que 28 Jours plus tard et 28 Semaines plus tard.
Après avoir été publié au Royaume-Uni, aux États-Unis, à Taïwan et même illégalement en Iran, comment as-tu réagi quand Panini Books t’a contacté pour publier Zom-B en France ? Sais-tu comment le livre a été reçu jusque là ?
J’ai toujours aimé quand mes livres sont traduits dans d’autres langues – ça me tue de penser que mes histoires peuvent voyager si loin ! J’étais vraiment content de voir que Zom-B allait être traduit en français, car comme je suis un cinéphile, avec beaucoup d’amour pour le cinéma français, je trouve ça cool de faire partie de la scène culturelle, même un peu. Sinon, je n’ai pas encore eu de feedbacks de mes lecteurs français, j’espère en avoir bientôt !
Pour en revenir à l’histoire de Zom-B, j’aime l’idée d’avoir cet anti-héros raciste comme personnage principal mais cela a dû être un exercice difficile d’écrire un tel livre pour un jeune public. Pourquoi avoir choisi une option si difficile ?
Hehe, je me suis toujours confronté à la difficulté pour écrire. C’est facile à oublier, étant donné mon succès, mais je n’ai jamais été considéré comme un acteur à part entière de la scène littéraire. J’ai toujours créé des histoires qui sont difficiles à catégoriser et à résumer, soit à cause de leur longueur, du mélange des genres, de la complexité du scénario ou pour leur pure horreur. Cirque du Freak a été refusé par grosso modo tous les éditeurs aux Royaume-Uni avant d’être finalement publié, et même si mes livres se sont vendus par millions depuis, je ne pense pas que le milieu littéraire ne m’ait vraiment considéré – mais heureusement les fans le font.
En ce qui concerne Zom-B, je savais dès le départ que je voulais raconter une histoire depuis la perspective d’une personne raciste. C’est une histoire de rédemption et d’espoir. Je voulais dire à mes lecteurs que peu importe comment on a été élevé ou ce qu’on nous a dit de croire – chacun d’entre nous peut s’affranchir de cela. Nous avons tous besoin d’écouter notre cœur avant d’écouter les autres, même les personnes que nous aimons le plus au monde. Si on fait ça, on a tous le pouvoir de changer et de devenir des personnes meilleures et peu importe ce qu’on a fait avant quand était plus jeune sous l’influence des forces obscures.
Pourquoi avoir choisi de cacher le sexe de l’héroïne jusqu’à la fin du livre ? Etait-ce uniquement pour surprendre le lecteur ?
Il y a plusieurs raisons. Une était, effectivement, de vraiment surprendre le lecteur. Mais je l’ai aussi fait parce que je voulais que les lecteurs prennent garde à ne pas bâtir de certitude. C’est l’un des thèmes qui revient dans Zom-B : nous devons nous méfier des idées préconçues que l’on a dans la vie. Nous ne devrions pas avoir confiance en quelqu’un juste parce qu’il a l’air sympa et logique. Nous devrions toujours poser des questions et rechercher la vérité. En laissant les gens croire que B était un garçon, je les défiais, les invitais à aller plus loin après avoir découvert son sexe et à se demander ce qu’ils auraient pu baser sur des préjugés dans la vie.
Pour en revenir à tes zombies, comment as-tu l’idée de la secte des morts-vivants et que peux-tu nous dire sur leur si mystérieux leader ?
C’était simplement un processus avec de nombreuses questions. Je savais qu’il y aurait des zombies conscients dans la saga, et qu’ils auraient été créés très précisément dans cette optique. Cela a mené à la question : qui a créé de telles créatures et pourquoi ? Les réponses sont en réalité beaucoup plus compliquées et tordues que ce que les lecteurs peuvent imaginer dans les premiers livres – c’est une saga qui grandit et évolue au fil des tomes, et même dans les derniers livres, l’histoire contient encore de grosses surprises et révélations.
As-tu utilisé des zombies mangeurs de cerveaux en hommage à Le Retour des morts-vivants ou est-ce vraiment un élément important de l’histoire ?
J’ai simplement le sentiment que les zombies mangeurs de cerveaux sont plus intrigants que ceux qui mangent n’importe quel morceau de chair. Ce que je veux dire c’est que n’importe quel banal cannibale peut mordre un bras ou une jambe. Mais craquer un crâne épais pour dévorer le cerveau qui se cache derrière… ça demande du style !
Avec la naissance de Dante (Félicitations !), n’as-tu pas parfois peur qu’il s’agisse de l’un des bébés effrayants des rêves de B ?
En fait, je me soupçonne d’avoir eu l’idée des bébés pour me convaincre de ne pas me reproduire ! Comme je l’ai déjà dit, j’ai eu une longue adolescence, et j’ai mis beaucoup de temps à accepter l’idée de devenir père, en sachant que ça changerait ma vie de manière irrévocable. J’ai un peu des TOC et j’aime ma petite routine bien confortable – qui évidemment devient impossible quand un bébé débarque. Je pense donc que mon inconscient m’a poussé à écrire au sujet de bébés cauchemardesques pour m’empêcher d’avoir mes propres enfants. Au final, j’ai choisi d’ignorer ces signes et je suis vraiment heureux d’avoir Dante et apprécie ces premiers temps en tant que père. Mais cela a vraiment été difficile d’en arriver là pour moi et certains démons que j’ai du affronter sont des démons (bébés) que j’ai moi-même créés.
D’ici la fin de l’année prochaine, la saga Zom-B devrait arriver à sa fin, sais-tu déjà quel sera le sujet de ton prochain livre ? Une autre figure populaire ?
Oui je sais parce que je l’ai déjà écrit. Je passe deux ou trois ans à travailler sur chaque livre que j’écris, j’ai donc normalement déjà commencé une nouvelle saga bien avant que la précédente n’ait pris fin. Je ne peux pas trop en dire sur le nouveau livre pour le moment, à part qu’il sera loin de l’horreur de Zom-B. Il y aura toujours un côté sombre, mais il sera plus fantastique qu’horrifique.
Un de tes livres a déjà été adapté en film, qui est même sorti au ciné en France, as-tu des plans pour une potentielle adaptation de Zom-B ?
Il n’y a rien pour le moment même si certaines sociétés se sont montrées intéressées. Un de mes livres pour adulte, Lady of the Shades, a récemment été acquis et ils travaillent sur un scénario pour le moment, en espérant que le projet soit retenu dans le futur.
Pour finir, une question traditionnelle sur MZC, si les zombies devaient devenir une réalité, que ferais-tu ?
Ben, cette question est posée au père de B au début de Zom-B et ma réponse est la même que la sienne – je mettrais ma tête entre mes jambes et dirais adieu à mon cul !
Il ne nous reste plus qu’à remercier Darren Shan pour sa gentillesse et son enthousiasme. De votre côté, il ne vous reste plus qu’à découvrir Zom-B si ce n’est pas déjà fait ou à guetter la sortie du tome 2 (et notre critique) en janvier prochain !
Interview réalisée et traduite de l’anglais par Squeletor et Baalero.