Critique du roman Projet Cornélia Tome 1 : Afflictions

Peut-être, et seul lui pourra le confirmer, Denis labbé avait-il déjà en tête l’idée, à la sortie de Les Errants, de revenir à plusieurs reprises à son univers zombies. Car, avec la publication en avril de Projet Cornélia Tome 1 : Afflictions, l’auteur revenait déjà pour la seconde fois à son univers, après la parution au format épisodique des Errances en 2015 et 2016. A priori destiné à un public adolescent et adulte, ce premier tome d’une future trilogie suit ainsi les aventures de Cornélia et de Jean-Michel, deux personnages rencontrés dans Les Errants et que nous avions depuis perdus de vue.

projet cornelia tome 1 afflictionsSi Les Errants n’avaient pas trouvé leur place dans mon panthéon de la littérature zombie, la lecture de cette trilogie s’était tout de même avérée bien agréable notamment grâce à son cadre français et à quelques bonnes idées autour de l’épidémie zombie qui nous était présentée. N’ayant pas lu Les Errances, j’étais donc curieux de découvrir ce que Denis Labbé nous réservait pour ce retour à son univers zombie.

Malheureusement, pour être tout à fait honnête et malgré tout le respect que j’ai pour Denis qui avait accepté mon invitation à participer à une table ronde zombie aux Halliennales en 2016, je n’ai pas été emballé par cette lecture. Et les raisons sont multiples.

Écartons cependant d’abord ce qui m’a plu avant de revenir à ce qui m’a bien moins convaincu.

Comme dans ses précédents ouvrages, je n’ai rien trouvé à redire au style de l’auteur. Denis Labbé offre en effet une plume fluide, qui n’en fait pas des caisses et qui colle très bien au récit. Il ne perd pas son lecteur et offre une juste mesure entre action, descriptions et retranscriptions des états d’âmes de son héroïne. Globalement, le travail éditorial est d’ailleurs de qualité et je n’ai repéré que de très rares coquilles.

Autre point fort, surtout pour moi qui ai horreur de la romance, la relation entre nos deux héros, deux adolescents que beaucoup de choses séparent, m’a agréablement surpris. Alors que j’avais peur qu’elle tombe dans la mièvrerie, l’auteur a réussi à trouver un bon équilibre entre Cornélia, une lolita gothique qui prend confiance en elle à mesure que l’histoire avance, et Jean-Michel, un héros souvent qualifié de psychopathe, mais qui m’apparaît davantage comme un garçon atteint d’une certaine forme d’autisme. Les deux ados ont besoin l’un de l’autre pour survivre et c’est sur ce constat que leur amitié se construit et qu’ils apprennent à se connaître. Reste néanmoins que certains de leurs dialogues tombent assez souvent dans la caricature et la redondance.

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Or, c’est justement là que le bât blesse. Alors que je pensais que le roman me proposerait rapidement un véritable fil rouge trépidant – nos deux héros veulent rejoindre Verdun où se trouvent les parents de Cornélia – j’ai très vite été lassé par leurs aventures. Cela est d’ailleurs assez paradoxal car chaque chapitre – ou presque – se passe après une ellipse (plus ou moins longue) et se concentre sur une des expériences de nos deux héros plongés dans ce monde apocalyptique. Ainsi, tandis que chaque chapitre s’attaque à un sujet différent, cela n’a pas empêché une vraie lassitude de m’envahir. Il est vrai que, ayant lu des dizaines et des dizaines de romans de zombies, il devient difficile de me surprendre, mais j’ai cependant trouvé que chaque aventure ne faisait qu’effleurer son sujet (globalement à chaque fois une illustration des vices de l’Homme) et que les fins étaient toujours précipitées. Entre les cannibales, les violeurs, ceux qui organisent des combats, ceux qui succombent à la religion, les pièges répétitifs tendus par les zombies, on finit par avoir l’impression de parcourir un catalogue des déviances humaines, voire des “chroniques de l’apocalypse” constituée de courtes nouvelles avec souvent, malheureusement, peu d’intérêt. La palme revient d’ailleurs au chapitre final durant lequel une survivante lambda nous raconte ses banales péripéties… Je me doute que celle-ci aura un rôle plus important dans le prochain tome, mais cette conclusion ne crée aucune attente pour la suite et c’est bien dommage.

les marcheurs tome 1 genèse denis labbéEnfin, je n’ai pas complètement adhéré à la narratrice (Cornélia) qui, bien qu’elle prétende plusieurs fois le contraire, s’obstine à mettre son apparence en priorité et tombe dans le ridicule dès qu’elle mentionne son arme, un katana qu’elle manie avec une dextérité surprenante, ce qui vient quelque peu gâcher les efforts de l’auteur pour rendre son récit réaliste. À ce titre, dans un chapitre, dans lequel je pensais enfin tenir un fil rouge avec l’introduction d’un vilain plus remarquable que les autres, Denis Labbé va même jusqu’à la présenter comme une super héroïne badass (qui se mêle de tout, poussée par une grande morale). Autant dire que l’impression qui en ressort n’était pas celle escomptée. Tant pis.

En fin de compte, je ressors de cette lecture en me demandant si Denis Labbé savait très bien où il voulait aller en lançant cette nouvelle trilogie. À ne pas faire de choix clair et à vouloir trop traiter d’aspects de l’apocalypse zombie en une seule fois, il offre une histoire que nous nous contentons de survoler sans jamais nous y plonger vraiment. Espérons donc que Les Marcheurs, une autre extension de cet univers, sera plus prenant ; nous ne pouvons que le souhaiter.

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