Critique de Le Monde des Morts 2 d’Isabelle Haury

bannière Le monde des morts 2

Isabelle Haury n’est pas une inconnue pour ceux qui suivent l’actualité littéraire du site, celle-ci nous ayant déjà proposé en 2013 un recueil de nouvelles Undead Story et un premier roman Le Monde des Morts rédigé sous forme de journal intime. Avec Le Monde des Morts 2, Isabelle Haury signe donc son deuxième roman sur notre sujet de prédilection et invite le lecteur à suivre la suite des aventures de Lucie, héroïne du premier roman, et seul personnage survivant.

La quatrième de couv’ nous dévoile un pitch où nous comprenons vite que cette suite ne s’inscrit pas dans la continuité du premier roman mais quelques années plus tard :

“Il y a treize années, les zombies ont envahi notre monde. J’ai perdu tous ceux que j’aimais et j’ai dû apprendre à vivre avec la peur au ventre. La vie s’est reconstruite tant bien que mal, imposant ses toutes nouvelles règles. Notre ville barricadée est synonyme d’espoir. Reconstruire et survivre, sont les deux mots d’ordre. Je dois m’y tenir, pour la ville, pour nous, pour mon fils.”

le monde des morts 2Cette fois, le format n’est plus celui d’un journal de bord. Le récit s’articule ainsi autour du point de vue des deux personnages principaux – Lucie et son fils Eric – et les arcs narratifs alternent donc d’un héros à l’autre.
Dès le début, fidèle à ce que nous avions relevé dans Le Monde des Morts, l’auteure insuffle un rythme narratif assez vif et nous apprend donc rapidement que Lucie fait maintenant partie d’une communauté bien organisée, qu’elle a un fils adolescent (dont le père est mort à la toute fin du récit précédent) et quelques responsabilités au sein de ce groupe. Sur la même lancée, elle nous présente également l’autre personnage principal, le fils de Lucie, Éric. Le chat Miky, quant à lui, n’est plus, une bien bonne nouvelle si vous vous rappelez de ma critique du premier tome.

Grâce au personnage d’Eric, Isabelle Haury a donc la bonne idée de nous présenter le point de vue d’un protagoniste n’ayant pas connu “l’avant” apocalypse. C’est assez agréable puisque cela nous donne un point de vue original et peu rencontré en général. Il est d’ailleurs amusant de voir que le journal de Lucie (le premier tome de Le Monde des Morts) a une place importante dans le récit. Une sorte de timide passage de quatrième mur. Eric utilise ainsi le journal de sa mère pour en apprendre un peu plus sur l’extérieur de l’enceinte de la communauté qu’il ne quitte jamais. Isabelle Haury fait toutefois rapidement évoluer la situation et, sans perdre de temps, pousse le lecteur à assister aux pérégrinations des personnages, séparés par le destin (et quelques zombies). Les plus malins auront donc déjà compris que l’essentiel de l’intrigue du roman se centre sur la volonté de Lucie et de son fils de se retrouver.

premiere couverture le monde des mortsLe Monde des Morts 2 n’a rien à envier à son prédécesseur. En fait, nous pouvons faire les mêmes observations concernant cette suite. Par exemple, lors des différentes scènes d’action, pas d’explication : les zombies arrivent de partout. Nous ne savons pas d’où ils sortent. Ils sont là, ils sont partout, c’est tout. Pas le temps de tergiverser, les héros sont noyés sous ce flot de monstres et nous ressentons bien la notion de danger imminent. C’est assez efficace pour bouleverser le rythme du lecteur. Mais si ce stratagème est intéressant pour créer de la tension, il est trop souvent utilisé dans le roman et au final mal exploité. La surprise du lecteur passée, l’incompréhension prend place quand nous essayons de nous représenter la scène. La lisibilité est complètement tronquée, l’auteure étant avare en descriptions. Nous nous perdons ainsi dans la “mise en scène” : c’est brouillon. Encore une fois, Isabelle Haury dispense chichement les éléments qui pourraient permettre une immersion totale.
C’est d’ailleurs un défaut que nous retrouvons dans la description des personnages : ils restent assez creux et il leur manque un corps, faute d’avoir été bien décrits. De fait le constat est là : l’auteure n’a semble-t-il pas changé son fusil d’épaule et retombe dans les mêmes travers, ni visiblement essayé d’étayer les 216 pages du roman.

Ce constat est cependant amer car Isabelle Haury dépeint plutôt bien les interactions entre les personnages avec des réactions humaines plausibles ou une cohérence dans leurs relations. Plusieurs fois dans le roman les personnages s’opposent, ne se comprennent pas ou encore doivent faire face à des évènements choquants. Les réactions sont globalement assez logiques, les sentiments décrits bien adaptés selon le caractère de chaque personnage. En revanche, même si les sentiments semblent en adéquation avec l’action et les personnages, c’est encore dans leur traduction verbale que le bât blesse. Le récit est en effet plombé par un aspect trop teen lit’, avec un arrière goût d’immaturité qui flotte dans les dialogues. Pour résumer : les réactions humaines sont bien amenées mais la verbalisation est théâtrale, souvent dans l’excès. J’ai parfois eu l’impression de lire le script d’un épisode de Plus belle la vie version apocalypse zombie. À la limite de la niaiserie. Ça peut paraître dur mais je n’ai pas pu me départir de ce sentiment durant ma lecture. Malheureusement, même le scénario semble se situer sur cette ligne : classique, sans surprise scénaristique réelle. Tout au plus tressaille-t-on quand certains personnages révèlent leur véritable nature. La trame n’est pas des plus formidables, sans toutefois être catastrophique.

En conclusion, Le Monde des Morts 2 ne semble donc pas avoir profité d’une maturation qui faisait déjà défaut à son prédécesseur. Cependant, il reste difficile de détester cette production tout juste moyenne, mais face à d’autres écrivains “débutants”, Isabelle Haury fait malheureusement pâle figure.

Ce roman de 216 pages est disponible ici en version numérique ou papier.
Vous pouvez retrouver l’actualité de l’auteure sur son site officiel

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À propos de l'auteur

Incapable de se faire comprendre par le genre humain, vif comme un cailloux roulant au fond d'une rivière, beau comme une olive verte oubliée au soleil, Baron Mardi s'est, il y a de nombreuses années, tout naturellement rapproché des zombies qu'il considère comme ses pairs. Il pense, parle et surtout sent le zombie. Bref, on peut dire que Baron Mardi aime le zombie. Détail troublant: Jusqu'à présent, il évite soigneusement de parler de ses goûts culinaires. Allez savoir pourquoi...

2 commentaires

  1. seb dit :

    Moi j’avais pas trop apprécié , donc “joker” pour le 2 …

  2. Gérard Alain dit :

    Le un ne m’avait pas marqué le 2 se lit sans passion. J’ai la sensation d’avoir perdu mon temps

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