Daniel W. Drezner, l’un des membres du bureau de la Zombie Research Society, professeur américain de politiques internationales et auteur de Theories of International Politics and Zombies, a publié hier dans The Wall Street Journal, un article extrêmement pertinent sur le zombie.
Cet article se fait l’écho d’une intervention récente de Daniel W. Drezner à TEDx (vous pouvez retrouver la vidéo à la fin de la news) au cours de laquelle il exposait à peu près les mêmes idées. Il rappelle ainsi rapidement dans son article pourquoi les zombies sont si terrifiants :
« Les morts-vivants classiques des films de George Romero sont horribles dans leur lenteur et leur maladresse. Toutefois les morts-vivants compensent aisément leur lenteur. Les zombies appartiennent à ce que les ingénieurs en robotique et en animation appellent la « Vallée Dérangeante » (Uncanny Valley) de la perception humaine. N’étant plus humains, ils restent si proches de nous qu’ils provoquent une répulsion immédiate. Un autre avantage du zombie est que 100% des personnes mordues se transforment en zombie. Même les pathogènes les plus virulents que l’on trouve dans le monde réel (le virus Ebola ou le Sida) ont des taux d’infection inférieurs à 50%. »
Cette théorie de la “Vallée Dérangeante” est effectivement extrêmement intéressante, celle-ci montrant la relation entre le degré de familiarité vis-à-vis d’un être de synthèse et sa ressemblance avec l’homme. Le zombie, étant à la base humain, ressemble donc fortement à l’Homme et crée donc un sentiment élevé de répulsion.
Dans la suite de son article, Daniel W. Drezner revient sur ce que, selon certains, le zombie matérialise (métaphore de la récession, du manque de ressource, du changement climatique ou encore de la peur pandémique) dans une réflexion somme toute classique. Il parle ensuite des risques liés au zombie devenu mainstream.
« Il y a malgré tout un problème au fait de faire constamment référence au mort-vivant. Le problème le plus grave se retrouve dans l’analogie utilisée. Certains [organismes politiques] utilisent le zombie pour capter l’attention mais ils oublient bien trop souvent un élément clé d’une histoire zombie : elles sont toujours liées à la notion d’apocalypse. Souvent les zombies y apparaissent dès la première minute et 10 minutes plus tard, le monde est réduit à un champs de ruine. La conséquence est que le jour où une menace proche de celle des zombies apparaîtra, l’État et la société civile vont rapidement s’effondrer.
Cette trame narrative apocalyptique pose problème si les gens acceptent implicitement l’idée que des menaces réelles pourraient mener à ce genre de chute du système. La perception joue un rôle essentiel dans le maintien de l’ordre public. Si les Américains pensent que nous sommes déjà au bord de l’apocalypse, le fait d’avoir intégré mentalement cette idée pourrait contribuer à nous mener réellement à la chute. […]
Il y aura toujours une place pour le zombie dans la vision post-apocalyptique de The Walking Dead mais nous avons aussi besoin d’histoires comme World War Z de Max Brooks dans lesquelles la capacité, l’ingéniosité et la créativité de l’être humain sont mis en valeur ».
En d’autres termes, Daniel W. Drezner nous rappelle que si le zombie peut être très utile comme moyen pour véhiculer un message en cas de problème à l’échelle mondiale, il ne faut pas oublier qu’il reste une figure de fiction. Si la plupart des œuvres zombies privilégient un monde dans lequel les gouvernements se sont tous effondrés, rappelons nous que la plupart des États ne sont pas attentistes en la matière de sécurité nationale comme on peut le voir avec la réaction immédiate de la Chine face aux nouveaux foyers de grippe aviaire. Trop croire en l’incapacité des gouvernements à réagir pourrait justement nous pousser au fond du gouffre, si chacun se la joue survivant de l’enfer. En attendant ce que l’on a appris avec les œuvres zombies pourrait bien nous servir prochainement pour affronter l’armée de Decepticons de Kim Joung-Un.