Lorsque l’on pense à comics zombies, plusieurs noms de grandes maisons d’édition américaines viennent en tête : Image Comics (The Walking Dead), Marvel (Marvel Zombies) et Avatar Press. Cette dernière, connue pour la violence et l’érotisme de ses publications, est ainsi l’un des éditeur les plus actifs aux États-Unis en matière de comics zombies puisqu’elle publie notamment les comics Crossed, The Extinction Parade et tout un tas de dérivés de La nuit des morts-vivants. C’est ainsi que le groupe italien Panini, qui assure la publication en France d’une grande partie du catalogue d’Avatar Press mais également des Marvel Zombies, propose au lecteur français de découvrir le premier tome de La nuit des morts-vivants : Après l’apocalypse.
Étant donnée la tendance d’Avatar Press à publier des comics mêlant violence et sexe de manière imbécile et la médiocre qualité des comics La nuit des morts-vivants jusque là, je dois avouer que j’étais inquiet à l’idée de lire ce comic. A ce titre, les premières pages ne sont pas rassurantes puisqu’elles nous infligent une scène à connotations sexuelles vraiment inutile. Heureusement, passée cette accroche au goût plus que douteux, la véritable histoire démarre. On découvre alors la chanteuse d’un groupe de rock en plein concert, alors que ses fans, déguisés eux-mêmes en morts-vivants, se retrouvent submergés par de vrais zombies. Désormais en fuite, la chanteuse part retrouver son père qui a s’est refugié dans un hôtel à Las Vegas où l’épidémie est censée être contenue. Toutefois, l’hôtel ne restera pas longtemps sûr.
Comme vous le savez certainement, la publication des comics aux États-Unis est très différente de ce qui se passe en France. En effet, les comics y sont publiés sous forme de petits fascicules de quinze à vingt pages qui sont ensuite réunis dans de plus gros ouvrages. Ainsi, le premier tome de La nuit des morts-vivants : Après l’apocalypse réunit les 6 premiers numéros du comics. Le problème avec cette manière d’éditer les comics américains est que l’ouvrage ainsi constitué peut parfois apparaître comme décousu. C’est le cas de La nuit des morts-vivants : Après l’apocalypse.
En effet, aux États-Unis alors que plusieurs semaines peuvent s’écouler entre la sortie de deux numéros consécutifs, il est nécessaire pour chaque numéro d’accrocher l’attention du lecteur dès les premières pages et lui offrir une chute mémorable en fin d’ouvrage. Chez Avatar Press, la réponse à cela est systématiquement la même : présenter femmes nues et/ou scènes extrêmement gore afin de marquer la fin et le début de ses numéros. Le résultat est que La nuit des morts-vivants : Après l’apocalypse est ainsi presque privé de toute logique interne avec une gestion du rythme en dents de scie puisque les scènes aguicheuses s’enchaînent sans pour autant soutenir le récit. De plus, ces premiers numéros servant surtout à présenter les différents protagonistes de l’histoire (il est ainsi difficile de juger le scénario général de David Hine pour le moment), le lecteur est projeté sans cesse d’un lieu à un autre et d’un groupe de personnages à un autre. Même si on finit par s’y retrouver lorsque les protagonistes commencent à se regrouper, la lecture reste hasardeuse comme si on tentait de lire tranquillement le journal dans des montagnes russes.
Heureusement, la longue brochette de personnages que l’on découvre – la chanteuse du groupe de Rock et son père, un sénateur américain, un homme en pleine aventure extra-conjugale dont la femme débarque à L.A., une vielle dame folle de machines à sous et son discret mari ou encore un truand – s’avère étonnement intéressante à suivre. Avec Avatar Press et notamment, Crossed et les autres comics répondant au nom de La nuit des morts-vivants, nous étions habitués à découvrir des personnages réellement insipides. Bien que jamais très loin de la caricature, le choix de présenter tous les personnages sous leur mauvais jour, comme des personnes antipathiques et regroupant bon nombres des défauts de l’humanité, s’avère finalement judicieux. Le lecteur ne s’attache ainsi jamais à ces personnages mais reste désireux de découvrir leur sort. Comment ce truand va-t-il s’en sortir ? Que va-t-il advenir du couple de petits vieux ? La vieille dame mourra-t-elle à cause de son avarice ? Le mari infidèle sera-t-il puni par une mort violente ? La possibilité de voir ces personnages payer pour leur comportement devient alors une belle carotte que le lecteur essaie de saisir.
De plus, certains passages et dialogues sont d’une rare intelligence pour ce type de comic penché sur l’extrême violence. La chanteuse du groupe de rock fait ainsi preuve d’un pragmatisme vraiment attirant au début du comic lorsque son petit ami est mordu par un zombie et la scène de leur séparation est plus que réussie. De la même manière, l’idée du personnage ayant vendu des “assurances contre les zombies” afin de se faire de l’argent lors de la première épidémie et qui se retrouve de facto ruiné à cause de cette nouvelle vague est cyniquement excellente. Enfin, un des passages du comic, au cours duquel on retrouve un personnage secondaire immunisé aux morsures de zombie, est, avec son final (qui rappelle celui de La Nuit des Morts-Vivants 1968), une vraie réussite et un pied de nez mémorable à un des poncifs du genre (je ne vous en dis pas plus).
En ce qui concerne le dessin, il est bien évidemment caractéristique des publications d’Avatar Press avec un trait appuyé et des couleurs flashy. Même si le comic manque ainsi d’une identité visuelle propre, German Erramouspe propose un travail de plutôt bonne facture malgré quelques visages parfois très mal dessinés. Il apporte toutefois un très grand soin aux détails des zombies et aux scènes gores, multipliant les gerbes de sang et autres apparitions de tripes Son application s’étend d’ailleurs également aux plans nichons gratuits qui ponctuent tout l’ouvrage.
En fin de compte, ce premier tome de La nuit des morts-vivants : Après l’Apocalypse apparaît comme le storyboard multicolore d’un film d’exploitation qui nous propose de découvrir une bande de personnages pas inintéressants avec quelques scènes qui se détachent de la masse gluante de l’ensemble. On a clairement entre les mains, une série qui pourrait sortir du lot des nombreuses publications zombies d’Avatar Press. Maintenant que les personnages sont réunis sur les routes de Californie, j’ai hâte de voir vers quoi l’histoire va se diriger.