Alors que Max Brooks l’auteur de World War Z était de passage en France pour quelques jours, le Dernier Bar avant la fin du Monde et le Livre de Poche en ont profité pour organiser un concours permettant de participer à une rencontre VIP avec lui, lundi dernier à Paris.
Comme nous avons l’honneur de faire partie des élus, nous avons le plaisir de vous présenter un bilan de cette conférence, qui a permis à une trentaine de fans francophones de passer quelques heures en compagnie de Max Brooks.
Le Dernier Bar avant la fin du Monde a reçu tout ce petit monde dans une salle située au sous-sol (les habitués sauront de quoi il s’agit), idéale pour donner ce qu’il fallait d’intimité à la rencontre. Très ponctuel, Max Brooks était déjà présent bien avant 18h alors que la salle se remplissait petit à petit. Nous avons donc pu profiter au maximum des deux heures prévues avec un Max au top de sa forme.
Le programme fut simple, mais efficace :
- Introduction de Max Brooks
- Série de questions/réponses avec les fans
- Distribution de lots (3 livres pour chaque participant) et séance de dédicace
La majeure partie des échanges ont eu lieu en anglais car les participants avaient un assez bon niveau de compréhension de la langue. En cas de besoin, c’était le traducteur français de Max qui intervenait.
Comme il serait un peu assommant de vous narrer les moindres détails de l’entrevue, nous vous proposons plutôt un résumé thématique ponctué de quelques extraits traduits en français, de ce que nous avons trouvé le plus intéressant.
World War Z ou la question qui fâche
Bien évidemment, la question qui occupait l’esprit de tous les participants (et c’est certainement aussi votre cas !) concernait l’avis de l’auteur sur l’adaptation Brad-Pitt’isée de son roman : World War Z . C’est pourquoi, Max B. a choisi d’introduire l’échange de questions/réponses sur le sujet.
Grâce à son charisme naturel, l’auteur a capté sans aucune difficulté l’attention générale (en digne fils de son père dites-vous ?), mais nous a livré une explication très consensuelle :
“L’objectif de ceux qui ont acheté les droits de mon livre était de faire un “blockbuster d’été”. C’est un genre à part entière dont l’unique but est de plaire à un maximum de gens pour se faire un maximum d’argent. C’est ce qu’ils voulaient faire et ils l’ont très bien réussi. Tant mieux pour eux.
Au final, le film était si différent de mon livre que cela m’a rendu le visionnage plutôt facile. Vous savez, pour un auteur, il est très difficile de voir ses personnages sur un écran dire des choses qu’ils ne sont pas censés dire ou faire des choses qu’ils ne sont pas censés faire […] C’est ce que Stephen King a dû ressentir avec le Shining de Stanley Kubrick car il voit ses personnages mais l’histoire n’est pas la même ! Cela a dû être une torture pour lui de regarder ça […]. Pour ma part je n’ai pas eu ce problème car le film ne reprend pas les personnages de mon livre. En fait, il n’y qu’un seul personnage en commun ! […] Quant aux zombies, ce ne sont pas les miens non plus ! Mes zombies sont lents, alors que ceux là sont… “wouah” [rires] […]
Et puis je ne suis pas naïf, je sais que mon livre est bizarre. Une bonne histoire a un héros… il n’y a pas de héros dans mon livre. Une bonne histoire a un “méchant” – quelqu’un de mauvais qu’on peut haïr – mais il n’y a pas de méchant dans mon récit. Une bonne histoire nous propose de suivre un groupe jusqu’à la fin, mais je n’ai pas fait ça non plus. Moi, j’ai écrit des interviews… [rires]. C’est différent et je comprends que ce n’est pas facile pour le grand public d’apprécier, mais peu importe.”
Max B. a expliqué un peu plus tard qu’il a vendu les droits d’adaptation de son livre, mais qu’il n’a pas participé au scénario ni à la réalisation.
La question que tout le monde se pose alors c’est : “Mais pourquoi a-t-il vendu les droits de World War Z ?”. Pour l’argent, pour la célébrité ? Un peu des deux ? Une chose est sûre, la contrepartie devait être suffisamment intéressante pour laisser une poignée de gens dénaturer son œuvre.
De notre côté, en tant que fans on constate qu’une fois de plus, une bonne production zombies a été sous exploitée pour gonfler quelques portefeuilles déjà bien grassouillets. Nous sommes certainement passés à côté de ce qui aurait pu être très bon film – permettant par la même occasion de présenter le genre sous un angle un peu différent au grand public.
Reste à savoir si en servant ce discours, Max est sincère ou s’il reste politiquement correct pour sauver les apparences. En tout cas dans la salle, personne n’a osé émettre de doute quant à ses explications.
Le prochain projet de Max Brooks : une BD sur la première guerre mondiale
Après avoir discuté en long en large et en travers de World War Z (du film et du livre), on a quand même pu glaner quelques infos sur sa prochaine BD dont la sortie est prévue en avril 2014. L’auteur avait déjà évoqué le sujet sur son site officiel le 29 octobre dernier. Ce fut l’occasion d’apprécier une fois de plus la culture historique de l’auteur.
Dans cette bande dessinée intitulée The Harlem Hellfighters, Max B. laisse de côté les zombies et nous emmène un siècle en arrière pour nous raconter une histoire vraie qui s’est déroulée durant la première guerre mondiale.
A travers le combat des soldats afro-américains de l’armée américaine pour la reconnaissance de leur égalité, il aborde différemment un thème qui lui est cher : la survie.
“Mon prochain projet est une histoire vraie. Pas de zombie ni de vampire. Cette histoire a eu lieu durant la guerre de 14-18 et parle d’un groupe d’américains qui étaient soldats mais qui n’étaient pas autorisés à se battre pour le gouvernement. Ils ont été ségrégés par leur gouvernement qui ne voulait pas qu’ils se battent car ils étaient noirs. Notre gouvernement les a humilié en ne voulant pas les laisser participer à la guerre. Mais ce n’était pas le cas de la France qui se battait depuis 4 ans et qui avait besoin de soldats. Elle a donc dit : “Nous prenons n’importe qui ! Venez vous battre à nos côtés” [rires]. C’est ce qu’ils ont fait et ils sont presque devenus les soldats les plus valeureux de toute l’armée américaine […]C’est une histoire de survie car ces hommes noirs ont dû passer outre les humiliations pour prouver aux autres ce qu’ils étaient capables de faire.”
Les fans purs et durs du genre zombies seront peut-être un peu déstabilisés. Pourtant, en faisant ce choix, l’auteur met l’accent sur un point important : le zombie des récits modernes est bien souvent une excuse, un prétexte pour aborder plus légèrement des sujets qui nous préoccupent comme les épidémies, la guerre et au bout du compte, notre survie.
Quoi qu’il en soit, Max nous a plutôt bien vendu ce nouveau projet et a donné aux fans présents une bonne raison d’attendre sa sortie.
Max et Romero, une grande histoire d’amour
Durant cette conférence privée, Max B. a eu l’occasion de faire maintes fois référence à notre bon vieux George A. Romero, en profitant pour nous apprendre ou nous rappeler que c’est un grand ami à lui. Inutile donc de préciser qu’on n’aurait pas pu lui faire dire du mal de papy George !
Nous lui avons tout de même demandé ce qu’il pensait du fait que dans son prochain comic book (Empire of the dead), Romero introduise des vampires dans son histoire (pour rappel : dans le nouveau comic de Max Brooks, The Extinction Parade, la race Vampire combat les zombies). Voici ce qu’il nous a répondu :
Tant mieux pour lui ! C’est cool pour George. Peut-être que George et moi avons pensé à la même chose. Cela me met un peu mal à l’aise d’avoir fait quelque chose avant lui car George est le maître. C’est lui qui est à l’origine de tout ça. J’espère que Empire of the Dead sera un succès et que cela le remettra sur le devant de la scène culturelle américaine. Malheureusement, de moins en moins de personnes savent qui il est. […] De nos jours il y a des gens qui connaissent The Walking Dead mais pas les films de George. Ce sont les mêmes qui diront : “Qui ça ? Romero ? Qu’est-ce que c’est ?” [rires]. J’espère que Empire of the dead lui rendra ce qui lui appartient. Le maître devrait rester au sommet.
Pas de doute : pour Brooks, George A. Romero est incontestablement le père du genre zombie.
Et pour finir si vous n’êtes pas convaincu par cette déclaration d’amour, voici un autre extrait de la conférence qui vous le prouvera.
Question d’un participant : “Quel film pourriez-vous voir et revoir sans cesser d’être surpris et intéressé ?”
Max Brooks répond entre autres : “Dawn of the Dead : dans les films de Romero on peut découvrir quelque chose de nouveau à chaque visionnage”.
L’origine du patient zéro
Pour finir sur sujet un peu plus intello mais qui en a passionné plus d’un, nous vous traduisons le passage où Max Brooks a expliqué les raisons pour lesquelles selon lui, la Chine serait le berceau “idéal” du patient zéro.
“Le patient zéro est chinois. Nous parlions à l’instant de recherches qui permettent de rendre une histoire réaliste. Pour faire quelque chose de réel je me suis appuyé sur des faits réels, de vraies sources. Quand j’élaborai cette histoire d’épidémie zombie, je voulais parler de son origine. Peu d’œuvres abordent ce point. Bien souvent, l’histoire commencent alors que l’épidémie est déjà en train de se répandre. Pour remonter aux origines, je devais être logique. De quoi avais-je besoin ?J’avais besoin d’un pays avec une population très importante. Je ne pouvais donc pas prendre le continent africain car sa population est trop dispersée. En plus de cela, j’avais besoin d’un pays avec une très bonne infrastructure, des transports pour que le virus puisse se répandre. Je ne pouvais pas prendre l’Indonésie par exemple, car elle est constituée d’iles. Et le plus important de tout, j’avais besoin d’un gouvernement qui peut censurer la presse. J’aurais pu choisir l’Inde mais la presse indienne est libre, donc les gens auraient été informés et auraient fui le pays et peut-être que l’épidémie aurait pu être stoppée. C’est donc selon moi ce qu’il s’est passé. Le virus s’est répandu en Chine et l’ONU a dit à la Chine qu’ils voulaient entrer dans le pays pour étudier le problème, mais la chine a répondu “Non, il n’y a pas de virus, il n’y a aucun problème ici” [rires]. Et c’est comme ça qu’on trouve ensuite des personnes infectées au Canada. Des porteurs du virus ont pris l’avion depuis la Chine vers le continent américain et c’est ainsi que virus peut ainsi traverser toute la planète ! Je me suis dit : “Voilà, c’est comme ça que le virus va se répandre”.
A de nombreux égards, cette rencontre fut réussie. Max Brooks s’est montré à l’écoute et il a su nous captiver par ses talents d’orateur, ses nombreuses anecdotes et sa culture générale.
On regrette un peu que l’échange de questions/réponses n’ait pas été plus riche en nouveautés et que rien de plus n’ait été dévoilé sur ces projets futurs. Si vous vous arrachiez les cheveux à l’idée de passer à côté d’une exclusivité potentielle, pas de panique, vous n’avez rien loupé en dehors du “show” de Max Brooks, qui à lui seul vaut le détour.
On vous invite à suivre notre actu dans les jours à venir puisque nous traduisons en ce moment même pour vous une sélection des questions/réponses que nous avons préférées, ainsi qu’une interview exclusive de Max Brooks, réalisée juste avant la rencontre par NIAM (ancien rédacteur en chef de tuezlestous.com avec qui nous conservons des rapports privilégiés).
En attendant, si vous êtes pressés et non anglophobes, vous pouvez toujours jeter un coup d’œil à cet extrait de la rencontre, publiée sur Youtube par Place to Be :
2 commentaires
Chanceux ! Ce type a beaucoup de charisme et ca a du etre très sympa de le rencontrer ! Sinon y a t-il eu une question sur l’éventuelle suite du “film” de Brad (sic) ? A-t-il des projets futurs sur les zombies (même si j’ai bien compris que c’était dur d’arracher à un américain ce qu’il a comme projets) ?
Merci pour cet article.
Oui c’était vraiment très bien, on aimerait que ce genre d’occasions se reproduisent plus souvent pour que plus de personnes puissent en profiter ! En tout cas, on était vraiment contents d’être de la partie, même si malheureusement, toute l’équipe de MZC n’a pas pu en profiter.
Il n’y a pas eu de référence à la suite de “World War Z”, certainement parce que dans le fond, ça n’intéressait pas vraiment les lecteurs de Max Brooks qui pour la plupart ont été trop déçus du premier volet…
Quant à ses futurs projets zombies, il n’a rien évoqué en public qui puisse laisser penser qu’il y en a sur le feu. Il a uniquement fait référence à ses comic books “The Extinction Parade” et “The Harlem Hellfighters” dont je parle déjà dans l’article.