Épisode 11 – Terrain Miné
Henry sentait son souffle sur ses lèvres et sa poitrine se soulever au rythme des battements de son cœur. Il était en vie.
Après l’avoir surpris par derrière, le cul-terreux à la casquette l’avait désarmé et s’était défoulé sur lui avec la crosse de son arme. Il l’avait violemment frappé, enragé par l’agonie de son frère, une main en moins. Il l’avait ensuite traîné hors de la maison jusqu’au terrain de football. Puis il l’avait laissé seul, à demi conscient. Seul face à ses propres démons.
Henry ouvrit lentement les yeux en reprenant peu à peu ses esprits. Son visage ensanglanté le faisait atrocement souffrir. Il mit quelques secondes à comprendre ce qui lui était arrivé alors que ses pensées allaient vers les deux femmes enfermées dans la cave. Il reprit alors pleinement conscience, poussé par un incroyable instinct de survie. Sa vision, jusqu’alors brouillée par les coups de crosse, s’éclaircit et ses yeux se figèrent sur l’immense stade qui s’était dessiné tout autour de lui. Une clôture entourait le terrain, un portail grillagé donnant sur les gradins était ouvert.
Henry était au centre du stade, attaché par des chaînes à un rondin d’environ deux mètres de hauteur, les mains dans le dos. La bille était enfoncée dans le sol, l’empêchant ainsi de se libérer. Il parcourut le terrain d’un regard circulaire et comprit aussitôt. Des dizaines de rondins l’entouraient, suffisamment espacés pour couvrir tout le stade. Sur l’un d’eux, un corps à moitié dévoré gisait mollement contre le tronc, les jambes décharnées ; un amas de chair et d’os s’entassait au pied d’un autre. Des cadavres mutilés de femmes et d’enfants s’étendaient contre les troncs, encore attachés. Le terrain était devenu le dernier restaurant à la mode pour les morts-vivants, établissement tenu par deux culs-terreux sans état d’âme.
S’il ne voulait pas finir comme tous ces gens, tombés dans le piège des deux frères, Henry devait se libérer à tout prix. Le portail était ouvert. N’importe quoi pouvait se faufiler à l’intérieur.
Il enfonça les pieds dans le sol humide et, en prenant appuie, poussa. Mais le tronc ne bougea pas. Il poussa encore et encore, jusqu’à ce que la bille oblique sensiblement vers l’arrière.
Alors qu’il pensait pouvoir enfin se libérer, des mouvements provenant des gradins attirèrent tout à coup son attention. Il plissa les yeux, aveuglé par les rayons du soleil, et aperçut une silhouette dans les rangées, puis une deuxième. Une troisième ombre vint se joindre aux festivités. C’était des formes abstraites. La chaleur se reflétant sur le toit en toile des gradins les rendait difformes, presque indistinctes. Mais quand un nuage traversa le ciel, masquant entièrement le soleil, Henry distingua clairement trois morts-vivants qui erraient entre les sièges. Son cœur se serra et il redoubla d’effort pour se libérer.
Une des créatures, un policier maculé de sang titubait dans les rangées. Son arme de service pendait le long de sa jambe droite, attaché à son étui par le cordon de sécurité en plastique noir. Il avançait sans but, le regard fuyant. Derrière lui, ses deux compagnons d’infortune, une femme en sous-vêtement et un gros type en salopette bleu, le suivaient sans raison apparente. Ils se contentaient de marcher sur ses pas comme des fidèles disciplinés.
Le policier stoppa sa lente progression en haut des marches qui menait au portillon ouvert sur le terrain. Il se tenait droit, son corps se balançant légèrement de droite à gauche comme s’il devait rester en perpétuel mouvement pour ne pas tomber. Il releva difficilement la tête en poussant un gémissement rauque et ses yeux vidés de toute expression se posèrent sur Henry qui tentait toujours de se libérer. Il l’observa une seconde, peut-être deux, sans réaction. Puis, une étincelle jaillit dans son cerveau.. La sensation de faim jusqu’alors enfouie refit surface et il poussa un râle terrifiant qui résonna dans tout le stade. La femme et le gros type grognèrent à leur tour quand ils aperçurent Henry.
Le policier courut vers le portillon et se retrouva en un instant sur le terrain. Ses compagnons le suivaient de près, rugissant à plein poumon. Le macchabée fonçait vers Henry tel un obus lancé à pleine vitesse, sans détourner le regard de sa proie. Il ne voyait qu’une forme ensanglantée qui s’agitait contre le rondin. Ce n’était rien d’autre qu’un morceau de viande qu’il fallait dévorer.
Le monstre se jeta sur Henry. Ce dernier, les mains toujours attachées autour du rondin, le repoussa avec les pieds et le fit chuter. La femme s’élança à son tour sur lui et subit le même sort alors que le gros type était juste derrière elle. Emporté par son élan, le mastodonte heurta de plein fouet sa proie. Le rondin ne résista pas et s’arracha du sol. Le mort roula sur le côté.
À sa grande surprise, l’étreinte des chaînes qui retenaient Henry s’était relâchée. Il glissait ses mains hors de leur emprise quand le policier se rua à nouveau sur lui, la gueule ouverte. L’homme stoppa in extrémis son attaque en maintenant son visage à distance. Il fit le tour de son agresseur et enroula la chaîne autour de son cou. Le mort grogna en tentant d’agripper Henry par-dessus ses épaules mais ne réussit qu’à effleurer ses cheveux. L’homme serra plus fort et le décapita. Il se saisit ensuite de l’arme qui pendait à la ceinture du zombie et la décrocha. Il tira sur la femme qui avançait vers lui mais l’arme s’enraya. Henry la saisit alors par le canon et frappa la morte avec la crosse. Un coup suffit à arracher la moitié de son visage et elle s’écroula.
Henry se posta ensuite au-dessus du gros type qui gesticulait au sol comme une tortue prise au piège sur sa carapace. Il martela son crâne jusqu’à ce qu’il ne bouge plus.
Il releva ensuite la tête pour s’assurer que la bagarre n’avait pas attirer d’autres morts-vivants et quitta le stade avec la ferme intention de délivrer les deux femmes des griffes des cul-terreux.
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