En mai dernier, les éditions Delcourt sortaient le premier tome de Revival, Bienvenue à la maison. Après la récente sortie du 18ème volume de The Walking Dead, la bande-dessinée la plus vendue en France (qui est également éditée par les éditions Delcourt), ces dernières reviennent au monde des morts-vivants de Tim Seeley avec Revival Tome 2 : Quarantaine. Bien que très éloigné de nos histoires de zombies habituelles (on parle ici de simple morts-vivants), le premier tome nous avait vraiment convaincu. Nous étions donc impatients de découvrir la suite.
L’histoire reprend là où nous l’avions laissée alors que l’officier de police Dana Cypress continue son enquête sur les meurtres qui se multiplient à Wausau et essaie de trouver l’assassin de sa soeur Martha, une des ranimés. Pendant ce temps la situation devient de plus en plus intenable pour les forces de police qui tentent de maintenir la ville sous quarantaine. La pression de la foule amassée autour de la zone réglementée devient impossible à gérer alors que religion et politique viennent galvaniser l’ardeur des mécontents. Pire, un étrange commerce d’organes de ranimés semble se mettre en place. Pendant ce temps la journaliste May Tao continue son investigation, ses doutes s’orientant vers une des célébrités de la ville qui semble cacher bien des secrets : que sait-elle des étranges spectres qui continuent à hanter la région ?
Comme le synopsis le montre, alors que le premier tome de Revival avait déployé une intrigue riche et captivante, ce nouveau volume continue à y greffer de nouveaux éléments. En effet, alors que nous suivons les différents personnages – entre l’enquête de Dana, les manigances des trafiquants d’organes ou encore les relations particulières entre le shérif et le maire de la ville – Tim Seeley nous prouve une nouvelle fois sa capacité à élaborer une histoire intelligente. Digne d’un polar de bonne facture capable d’accaparer l’attention du lecteur dès les premières pages, le scénario de Tim Seeley est parfaitement construit. L’auteur prend effectivement le temps de distiller les révélations au compte goûte tout en veillant à ce que chaque pièce du puzzle assemblée vienne en chambouler d’autres avec un nouveau mystère. Ainsi, un sentiment de mal aise émerge peu à peu chez le lecteur alors qu’il prend conscience que personne n’est innocent parmi les habitants. Malheureusement pour lui, il se retrouve alors, à l’image des personnages du comics, pris au piège de ces intrigues multiples et de la quarantaine qui se fait de plus en plus pesante. Le sentiment d’oppression gagne alors en intensité, le lecteur se retrouvant impliqué dans ce huis-clos à grande échelle, obligé d’assister au déchirement de la ville et aux manigances de ses habitants, incapable malgré tout d’éloigner son regard.
De plus, alors que la toile de fond de l’intrigue générale commence à se révéler, Tim Seeley continue à jouer avec l’ambiguïté des morts. Simple citoyens revenus à la vie ou créature effrayante ? Le doute demeure, certains se montrant d’une rare violence en accomplissant leurs vengeances tandis que d’autres se contentent de se réunir dans un comité des ranimés. Toutefois, même si ces derniers semblent inoffensifs, le lecteur ne peut s’empêcher de faire preuve de la même méfiance que les personnages vivants. Quel est leur objectif ? Sont-ils en train de s’organiser ? Autant de questions qui suscitent méfiance. De la même manière, en ce qui concerne la partie de l’histoire sur les spectres, même si elle ne constituent pas encore le cœur de l’intrigue, elle devient plus captivante, le mystère qui les entoure demeurant intact.
Enfin, outre le dessin qui reste tout à fait correct, ce tome voit l’introduction d’un cynisme et d’une pointe de critique sociale pas désagréables. Par exemple, l’apparition d’un leader d’opinion parmi la foule des contestataires peut être aisément assimilée à une critique cinglante du ridicule des discours démagogiques qui se sont multipliés notamment ces dernières années dans les talk-show américains. La rhétorique simpliste de ce personnage, qui s‘attire malgré tout les faveurs de la foule, apparaît comme particulièrement repoussante mais reste pourtant si représentative de ce par quoi bon nombre de personnes se laissent convaincre. Pareillement, les réactions de certains habitants – vis-à-vis de la communauté musulmane notamment – montrent à quel point la frontière entre religion et fanatisme est parfois mince. Enfin, Tim Seeley insiste sur la vulnérabilité de la petite ville montrant comment les responsables locaux restent à la merci des plus grands, comme les médias ou les agences gouvernementales, qui ne font que jeter de l’huile sur le feu. Tout cela contribue à la qualité du scénario et à entretenir l’intérêt du lecteur du début à la fin.
En un mot, nous vous recommandons une nouvelle fois ce comic. Certes, l’histoire a définitivement pris un cap différent d’une oeuvre zombie habituelle, mais la richesse et l’intelligence de l’intrigue nous convainquent que même ce genre de morts-vivants peut avoir son intérêt. En l’occurrence un intérêt palpitant.